La vie paroissiale
Lors du dimanche 19 mars 1916, monsieur le curé Lefebvre a été fêté par la population de sa paroisse et particulièrement par les jeunes au couvent des religieuses. En reconnaissance pour ce beau geste, l’abbé Lefebvre désigna le lendemain comme grand congé de classe pour les élèves.
Les fêtes de Pâques ont été très solennelles. L’orgue était tenu par madame Bernard Tanguay comme depuis de nombreuses années.
Une importante alerte est survenue au presbytère de Weedon. Monsieur l’abbé Lefebvre a eu une syncope de coeur. Il fut trouvé inanimé au pied d’un escalier de l’édifice. Sa chute lui occasionna d’assez graves contusions. Les soins et remèdes du médecin lui ont aidé à se guérir après avoir gardé le lit pendant plusieurs jours.
Lors de la première fin de semaine de mai, Sa Grandeur Monseigneur Chalifoux et les prêtres de sa suite ont été reçus par les dignitaires de notre église. Une foule considérable attendait le prélat à la porte de l’église au son des trois cloches et sous les drapeaux flottant sur tous les édifices de notre ville. C’était la première fois que l’évêque auxiliaire venait dans notre paroisse depuis le transport de l’église et du presbytère. Lors de cette visite, il fut reçu par les abbés Lefebvre, curé et Huard, vicaire. Monsieur Louis Brunelle, marguillier en charge de notre paroisse et aussi maire de la municipalité de Weedon-Centre, et son épouse Philomène Lassonde servaient de parrain et de marraine aux 141 enfants qui ont été confirmés, ce samedi après-midi. Invité au couvent, Mgr donna de précieux conseils à ces jeunes et provoqua des applaudissements nourris lorsqu’il leur annonça un grand congé d’école pour le lundi suivant.
Au cours de la messe du dimanche, Mgr recommanda la tempérance dans l’usage des boissons enivrantes. Il a quitté Weedon pour Stratford après avoir béni les paroissiens.
Mlle Georgette Champoux est aux études chez les Ursulines de Stanstead.
Une soirée dramatique et musicale a été rendue par les jeunes filles de la paroisse au bénéfice de l’église à la salle Péloquin de Weedon. Voici les noms de celles qui ont participé à ce spectacle : Mlles Bernadette Bourget, M.-A. Trudel, J. Tisdel, R.B. Bourgault, M.R. Brière, Maria Leblanc, M.J. Després, A. Galipeau, G. Péloquin, E. Galipeau, G. Landry, L. Fontaine, B. Proulx, L. Desmarais, J. Rouleau, R.A. Biron et R.D. Proulx. Plusieurs curés et étrangers des villages voisins se sont joints à notre curé pour souligner le succès de cette présentation.
Samedi le 5 août, dans la chapelle de la Maison Mère des Petites Soeurs de la Sainte Famille à Sherbrooke, Soeur Ste Marie-Aline, née Rose-Anna Desjardins, a prononcé ses voeux temporaires de pauvreté, chasteté et d’obéissance. Au cours des jours qui ont suivi, elle quitta la Maison Mère pour visiter sa famille à St-Gérard.
Mlles Jeanne Després et Anna Giguère ont quitté notre village pour l’école normale de Nicolet alors que Mlles Juliette Tisdel et Albina Domon se sont dirigées chez les religieuses de la Présentation de Marie à St-Hyacinthe pour leurs études.
Les paroissiens de Weedon apprennent avec tristesse le départ de l’abbé Huard pour St-Georges de Windsor.
Le 25 septembre, une partie de cartes a eu lieu à Fontainebleau au profit de la nouvelle paroisse. Plusieurs paroissiens de Weedon y ont participé. Cette activité a permis de recueillir des recettes au montant de 400.55 $. Des mercis chaleureux ont été adressés aux dames organisatrices de notre petite paroisse.
Au mois d’octobre, monsieur le curé Lebebvre a fait rapport de sa visite paroissiale pour l’année 1916. Nous comptons 304 familles pour une population totale de 1 676 âmes, dont 1 264 communiants et 414 non-communiants. 426 élèves fréquentent les écoles, 199 garçons et 227 filles. Au couvent de La Présentation, 94 garçons et 124 filles fréquentent cette institution.
Des foules nombreuses se sont rendues en pèlerinage à St-Gérard comme par les neuf années passées ce 16 octobre 1916. Étant donné le grand nombre de pèlerins, les prêtres recommandent de se confesser dans leur paroisse d’origine avant de se rendre sur les lieux du pèlerinage. Plus de 600 pèlerins sont venus de partout dans les Cantons de l’Est et de la Nouvelle-Angleterre. Dès la veille, les gens s’installent dans les hôtelleries et les maisons privées. Dès 5 h du matin, le petit sanctuaire est envahi par cette foule qui ne le quitte plus. À 10 h, une messe solennelle est chantée par le choeur de la paroisse. Un panégyrique de St-Gérard, puis une procession ont lieu sur la place de l’église avec la relique de Saint Gérard. Ensuite viennent la bénédiction d’objets de piété et la vénération de la relique du saint. En après-midi, R. P. Dom Paul Alix, Bénédictin de Saint-Benoît-du-Lac préside la cérémonie au sanctuaire. Le soir, ce sont les vêpres qui rassemblent à nouveau les pèlerins. Aux deux offices du matin et du soir, le gardien du sanctuaire distribue à tous les pèlerins un petit pain bénit, appelé petit pain de Saint Gérard, en souvenir des petits pains que Gérard enfant a reçus de l’Enfant-Jésus dans la chapelle en Italie. Cette année, on a remis des bijoux d’or au gardien du sanctuaire en reconnaissance des bienfaits obtenus de Saint Gérard.
À la mi-novembre, le Frère Marc-André de l’Institut des Écoles Chrétiennes de Montréal est venu donner une conférence aux élèves de l’école dirigée par les Soeurs de la Présentation de Marie de Weedon.
La vie scolaire
Mlle Georgette Champoux a quitté St-Gérard pour poursuivre ses études chez les Dames Ursulines à Stanstead. De même, Mlles Reine et Éveline Brière sont parties à St-Hyacinthe chez les religieuses de la Présentation de Marie.
Mlle Cloutier a repris l’une des classes du village de St-Gérard. L’autre classe n’a pas commencé l’année puisque Mlle Vachon est retournée chez elle pour des raisons de santé.
La clôture des classes locales a eu lieu mardi le 27 juin. Heureux écoliers et heureuses institutrices!
À la fin d’août, quatre jeunes chez Pierre Fortin, un chez Joseph Allard et un autre chez William Galipeau sont partis pour le Séminaire St-Charles à Sherbrooke.
Mlles Adrienne Bourget et Rose-Anna Daviau ont obtenu leur diplôme modèle alors que Mlles Fleur-Ange Benoît, Maria Brière et Yvonne Desmarais ont reçu leurs brevets élémentaires du Bureau central.
Le 4 septembre 1916, Mlles Marie-Julie et Sara Fontaine ouvriront les classes du village de St-Gérard comme institutrices. Dès la mi-septembre, Mlle Marie-Julie a reçu une gratification de 20 $ pour son succès dans l’enseignement. Elle a été accordée par monsieur J.A. Turcotte, l’inspecteur de notre région. Mlle Alice Daudier, une autre institutrice de Weedon qui a oeuvré à East Broughton l’an passé, a reçu comme récompense pour ses succès dans l’enseignement une prime de 20 $.
Monsieur Louis Fortin serait demeuré dans l’ancienne maison d’école du village du Lac Weedon.
Avant les vacances des fêtes, nos élèves de toutes nos écoles ont passé leurs examens. Des souhaits de bonnes vacances leur sont adressés.
Mlle Alice Dodier institutrice à Weedon est allé visiter sa famille à East-Broughton.
Monsieur Jean Daigneault est étudiant au Séminaire St-Charles Borromée de Sherbrooke. Madame Jeanne Raymond étudie au couvent de la Congrégagion à Danville. D’autres parts, Mlles Jeanne Després et Anna Giguère fréquentent l’École Normale de Nicolet. Mlles Jeanne Beaudry et Georgette Champoux poursuivent ses études à Stanstead. Chez les garçons, messieurs Jean-Charles et Paul-Henri Bourget, de même que Rock Lafond, Charles Fortin et Albert Galipeau sont étudiants à Sherbrooke. Ces jeunes de nos paroisses profitent de leurs vacances pour visiter leur famille.
La vie municipale
Dans la municipalité de St-Gérard, les élections n’ont fait aucune vague. Messieurs Paul Galipeau et L. Michel Phaneuf ont été réélus. À la première assemblée, monsieur Adolphe Lussier a été élu maire pour la troisième fois.
Messieurs Hormidas Gaudreau et Herménégilde Tessier ont été nommés conseillers pour Weedon-Centre. Monsieur Louis Brunelle qui était déjà conseiller a été élu maire en remplacement de monsieur L.Xavier Brisson. Messieurs Gédéon Grégoire et Philias Gagné ont été désignés membres du conseil du Canton de Weedon.
Des travaux pour la réalisation de trottoirs ont débuté vers la fin de juin 1916. Ils s’étendront de la résidence d’Arthur Lussier jusqu’à celle de Edmond Morin. Cette amélioration était devenue une nécessité.
Au mois d’août, le gouvernement Gouin est remercié pour avoir remis au conseil municipal de St-Gérard la somme de 1 200 $ pour réaliser des travaux de voirie.
Des travaux de gravelage ont été réalisés dans les rues de St-Gérard et sur le chemin menant vers Weedon au cours du mois d’août et septembre.
À la fin d’octobre, d’autres améliorations de chemins ont eu lieu entre Fontainebleau et Weedon ce qui en fera « les plus beaux chemins de la province ».
La politique
Messieurs S. Gosselin et J. S. Croteau ont assisté à la convention qui avait lieu à Weedon en qualité de délégués du Lac Weedon. Quelques jours plus tard, monsieur N. P. Tanguay, candidat libéral, a ouvert sa campagne électorale à Stratford. Plusieurs « rouges » y assistaient. Le 18 mai suivant, il tiendra une assemblée à St-Gérard.
Au cours de la deuxième semaine de mai, des assemblées politiques ont été tenues à Stratford, Disraeli, St-Jacques, St-Julien, St-Fortunat et Ham Nord où monsieur Tanguay a été acclamé alors qu’il rend compte de son mandat pour les derniers quatre ans. C’est l’occasion pour lui d’énoncer ce que le gouvernement de Sir Lomer Gouin a fait pour eux et qu’il se propose de faire à l’avenir, et ce, principalement pour les cultivateurs. Les nouvelles arrivées des diverses parties du Comté de Wolfe laissent croire en une victoire certaine de monsieur Tanguay avec une grande majorité après douze années passées à ce poste et pour un quatrième mandat.
Monsieur Thibault est l’adversaire de monsieur Tanguay. On dit que son programme est court et qu’il ne semble pas enthousiaste pour le rôle qu’il convoite.
L’élection de monsieur Tanguay a eu lieu le 22 mai.
Des représentants de différentes municipalités se sont réunis à Disraeli à la mi-octobre pour traiter de la construction d’une route modèle entre Sherbrooke et Beauce Jonction. Ce projet permettra de traverser les comtés de Beauce, Mégantic, Wolfe, Compton et Sherbrooke donc, les municipalités d’Ascot, East Angus, Dudswell, Marbleton, Weedon, Lac Weedon, Disraeli, Coleraine, Black Lake, Thetford, Robertonville, Leeds Station, East Broughton et Beauce Jonction.
Le milieu des affaires
Monsieur Joseph Biron de Weedon a vendu sa ferme à monsieur E. Morin qui demeurait à Stratford. À la suite de cette vente, monsieur Biron a ouvert un nouvel hôtel dans Weedon-Station, sous le nom de Hôtel Bellevue. De son côté, monsieur Euclide Giguère de Weedon-Centre a vendu la sienne à monsieur Wilfrid Dumas.
Des rumeurs circulent que le terrain de l’ancien hôtel Lamoureux serait vendu et qu’un nouvel hôtel moderne pourrait y être érigé.
Monsieur Alfred Beaudry a loué son magasin situé à la station de Weedon à un monsieur Laplante qui viendrait de St-Évariste. Ce jeune homme demeure chez des parents Rouleau et se cherche un logis.
Monsieur Skinner et sa scierie engagent encore de nombreux travailleurs dans Weedon-Station.
Des élections ont eu lieu à la Chambre de Commerce de St-Gérard. Les personnes suivantes ont été nommées : l’abbé C.J. Roy, chapelain; messieurs J.S. Croteau, président à nouveau; Émile Leriche, vice-président; Adolphe Lussier, trésorier; Joseph Desjardins, Louis Gagné, Frank Boucher et L.N. Leblanc, membres du comité exécutif.
Les produits de la ferme se vendent bien. Le foin de première classe vaut 22 $ la tonne et les patates, 75 cents. Plusieurs préfèrent ne pas vendre cette dernière production en espérant que le prix deviendra plus élevé.
Un déraillement a eu lieu dans la municipalité de St-Gérard. Dans la soirée du 21 février, la locomotive 44 du Québec Central a quitté la voie ferrée sur l’embranchement du vieux moulin entraînant quatre fourgons à bois à sa suite. Une équipe d’hommes venue de Sherbrooke ont travaillé toute la nuit jusqu’à trois heures de l’après-midi pour sortir la locomotive et les wagons de leur fâcheuse position. Heureusement, cet accident n’a causé que très peu de dommages.
Monsieur Louis Caron du Canton de Weedon a vendu sa belle ferme à monsieur Olivier Viens de Malboro, de l’état de New York qui en prendra possession au mois d’avril.
Au début du mois de mars, une assemblée a été tenue à l’école du village de St-Gérard au sujet de l’organisation éventuelle du téléphone local dans notre municipalité. Ce projet est prometteur. De nombreux intéressés y ont assisté. Dès le début d’avril, une compagnie de téléphone a été fondée. Le bureau de direction a été formé de messieurs Ferdinand Saulnier, Paul Galipeau, Fred Fontaine, L.N. Leblanc, U.W. Brière, J.A. Leblanc et J.S. Croteau. Lors de cette même assemblée, il a été décidé qu’une équipe d’hommes sera employée à poser les fils téléphoniques sur une étendue de cinq milles, c’est-à-dire d’un bout à l’autre de la municipalité.
Les travaux d’installation du téléphone ont débuté au cours de la dernière semaine du mois d’avril. Il est prévu qu’ils seront terminés à la mi-juin. En effet, les dernières boîtes ont été installées dans le village. Au début du mois d’août, monsieur Victor Couture de Stratford a fait l’inspection de la nouvelle ligne téléphonique locale.
Suite à cette inspection, une assemblée des délégués des compagnies de téléphone de Weedon, Stratford, Garthby et de St-Gérard a eu lieu dans cette dernière municipalité.
Vers la fin de l’année une autre rencontre a eu lieu entre les représentants des compagnies de téléphone de Weedon, Stratford et St-Gérard en vue d’une fusion de ces trois compagnies et de faire l’achat d’une ligne de téléphone de la Compagnie Bell qui permettrait de relier ces trois villages, Disraeli et la partie nord du comté de Wolfe.
Monsieur C.L. Labonté était le gérant de la banque de Weedon.
La Weedon Mining Company a repris ses activités et exploité une mine de plomb et de zinc sur le lot 42 du rang I de Montauban. Les résultats sont jugés satisfaisants. Toutefois, l’ouvrage à la mine de Fontainebleau marche jour et nuit au cours de l’été. Un baquet de minerai arrive à Weedon toutes les minutes et demie. Deux hommes travaillent pour charger les chars jour et nuit.
Le flottage du bois a débuté dans la deuxième semaine d’avril sur nos rivières. Rapidement, il a été suspendu à cause du manque d’eau dans les différents cours d’eau de notre région. Il ne sera pas possible de conduire à la rivière St-François les 50 millions de pieds de bois qui bordent actuellement les ruisseaux.
La scierie de monsieur Skinner est en pleine opération au cours du mois d’avril.
Dans la région de Weedon, il se fait du sucre en abondance. À chaque bordée de neige, une grosse coulée survient. Parmi les plus belles sucreries de la paroisse, nous pouvons nommer celles de messieurs Anthime Fontaine, Pierre Faucher, William Galipeau, Georges Patry, Philippe Patry, Albert Fontaine, Omer Fontaine, Alexandre Bernier, Alphée Fontaine et Vital Breton.
L’élévation de la hauteur du barrage Aylmer a occasionné un important contrat pour monsieur Edmond Morin de St-Gérard donné par le gouvernement provincial. En vue de régulariser le cours des eaux de cette rivière en aval de Disraeli, il devra transporter toutes les bâtisses actuellement sur le terrain autour du lac Aylmer qui, l’an prochain, sera submergé par les eaux de la rivière St-François.
Monsieur Adolphe Gauthier a vendu sa ferme de St-Gérard à monsieur Gourde. Temporairement, le vendeur s’installera dans la vieille maison d’école. De son côté au mois de mai, monsieur Michel Côté a fait encan. Il ira résider à Weedon où son fils a acquis un magasin de bijouterie. Monsieur Télesphore Morin a acheté cette ferme située sur le chemin de Garthby.
Monsieur Georges Tremblay de St-Gérard exploitera au cours de cette année la mine de Stratford.
Monsieur Stanislas Gosselin a acheté la propriété de monsieur Alexandre Malo à St-Gérard dont il prendra possession dès la mi-mai. Le vendeur nous quitte pour s’établir à Sudbury en Ontario.
De grands vents se sont élevés, au cours du mois de mai, occasionnant certains dommages aux estacades de la Brompton Company situées au lac Aylmer et sur la rivière St-François. La température n’est pas propice aux travaux des champs. Il est dit que nous avons les « grandes mers » de mai. Au début de juin, plusieurs cultivateurs n’ont pu faire toutes leurs semailles. Étant donné que la saison est avancée, les récoltes de beaucoup de produits semblent compromises.
Monsieur J.A. Leblanc de St-Gérard a fait l’acquisition d’une auto.
Le 21 juin, les derniers billots de la Brompton Co c’est-à-dire plus de 50 000 000 de pieds de bois auront passé dans l’écluse située à St-Gérard. De même, le flottage du bois sur la St-François est terminé. Nos braves travailleurs nous sont revenus sains et saufs.
Monsieur Donald Leclerc a acquis la propriété de monsieur J. Fradette de St-Gérard.
Dans La Tribune du 28 juillet, il est mention assez longuement du Two Miles Falls Power Co de Weedon. Sous l’invitation de monsieur O.E. Dorais, messieurs O.E. Denault et C. Thompson, ex-échevins de la ville de Sherbrooke ainsi que J.E. Poutré, ancien président du Board of Trade et Florian Fortin gérant administrateur de La Tribune sont allés visiter l’intéressant pouvoir d’eau que cette compagnie possède sur la rivière St-François et qu’elle a commencé à exploiter à Weedon. Ces personnes sont revenues enchantées de leur excursion et sont d’avis que ce puissant pouvoir électrique est intéressant, de grande valeur et qu’il va devenir facile et très avantageux à cause des travaux considérables que le gouvernement de Québec a entrepris au Grand lac St-François pour régulariser le cours de la rivière du même nom.
Ils ont constaté que les travaux que Two Miles Falls Power Co a entrepris en amont des rapides sont considérables. Une magnifique chaussée en béton et des machineries les plus modernes permettent de développer actuellement de 2 à 3 000 forces. À l’autre extrémité des rapides, il pourrait facilement se construire une autre chaussée qui donnerait une élévation approximative de 70 à 80 pieds et développerait facilement peut-être 7 à 8 000 forces. La formation du terrain et l’élévation des rives dont l’une est en roc solide à pic semblent propices à l’établissement d’un générateur puissant.
Près de deux mois ont passé. Monsieur J.-Eugène Roberge, directeur de cette compagnie, offre ses services pour faire visiter ce pouvoir d’eau au maire et aux échevins de Sherbrooke avant de leur faire une proposition d’achat. Ceux-ci acceptent l’invitation et invitent les gérants de manufactures locales de se joindre à eux. Auparavant, plusieurs citoyens influents de la ville étaient allés visiter cette industrie et que tous avaient été enchantés de ce qu’ils avaient vu.
Cette visite aura lieu vers le 22 septembre. L’Honorable Eugène Roberge, conseiller législatif et président de la compagnie Two Miles Falls Water and Power Co de Weedon accompagnés de messieurs I.-L. Lafleur et de O.E. Dorais, directeurs de cette même compagnie, dirigeait cette visite des lieux. Une trentaine de citoyens de Sherbrooke, ayant à leur tête le maire et plusieurs échevins de Sherbrooke, ont visité l’installation électrique offerte en vente. Deux chars spéciaux de la Québec Central avaient été mis à leur disposition pour les amener sur les lieux. Messieurs Napoléon Tanguay, député de Wolfe et un des propriétaire, le Dr Lemieux et plusieurs citoyens de Weedon les ont reçus à la gare de Weedon. Une dizaine d’automobiles amenaient les visiteurs au barrage.
Voici une description de ce barrage. À la tête des rapides se trouve un barrage considérable qui commande une chute d’eau de trente pieds de hauteur et une installation électrique tout à fait moderne. Le barrage est d’une longueur de 450 pieds dont la moitié est de bois, mais d’une construction solide et datant de quelques années. La partie sud est en béton et a été construite récemment. Les vannes ou pelles sont en parfait ordre. La station elle-même est vaste et neuve. Une turbine est actuellement en opération. Elle développe 1250 forces et a un rendement de 80 %. Le générateur, le gouverneur, l’excitateur et tout le reste de la machinerie installée sont ce qu’il y a de plus moderne. Il y a possibilité d’installer une autre turbine qui pourrait développer de 2 à 2 500 forces pour un total de 3 500. Cette nouvelle installation exigerait une mise de fonds de 30 000 à 40 000 $. La partie du barrage pourrait être refaite en béton, bien que pas nécessaire maintenant, pour la somme de 20 000 $.
Les 1000 forces actuellement développées sont vendues à la mine de cuivre de Weedon, à la compagnie d’éclairage de Weedon et de Fontainebleau et le reste à la Compagnie Hydraulique St-François. Cette vente rapporte 30 000 $. Les travaux considérables que le gouvernement de Québec réalise actuellement au lac St-François pour l’emmagasinage des eaux et la régularisation des eaux assureront la production maximum du pouvoir durant tous les mois de l’année. Ces travaux doivent se terminer pour le début de 1917.
Après avoir suivi les abords escarpés et les rapides de la rivière St-François, les visiteurs ont été invités à faire honneur aux fèves au lard et aux beignes canadiens qui leur étaient offerts. L’on continua, par la suite, la visite en aval des escarpements des rives qui s’élèvent en certains endroits à plus de 100 pieds de haut. Il leur a été montré un endroit qui serait propice à la construction d’un barrage éventuel qui donnerait une tête d’eau à plus de 75 pieds et qui pourrait développer au moins 8000 forces sans qu’il y soit risqué de noyer les terrains avoisinants. La compagnie Two Miles Falls possède en grande partie les terrains qui bordent la rivière.
Les visiteurs se sont rendus à la magnifique résidence de monsieur Napoléon Tanguay et ont poursuivi leur trajet jusqu’à la mine de cuivre de Fontainebleau. La visite s’est terminée à bord des trains spéciaux où un souper des mieux préparé y fut servi pendant le retour à Sherbrooke.
Le 17 octobre, nous apprenons par La Tribune que les propriétaires de la Compagnie Two Miles Falls sont prêts à le céder à la ville pour la somme de 400 000 $. Cette offre a été lue puis référée au comité du gaz et de l’électricité. Après la discussion d’affaires de routine, l’assemblée fut ajournée au lundi suivant.
Voici un résumé de l’offre que monsieur Dorais, directeur-gérant, a fait par écrit au maire et aux échevins de la Ville de Sherbrooke :
1- Un barrage construit, une partie en béton, une autre en bois, sur les lots 8 des rangs III et IV du Canton de Weedon à une hauteur suffisante pour développer une tête d’eau de 30 pieds de hauteur.
2- Une usine hydro-électrique qui comprend une turbine horizontale d’une capacité de 1250 forces qui actionne un générateur de 750 K.V.A. à 2 400 volts à 15 000 volts et autres machineries. En prévision d’un autre développement, cette usine a été aménagée pour recevoir une autre turbine de 2 000 forces raccordée à un autre générateur de 1 500 K.V.A. et devant fonctionner en parallèle à la présente installation.
3- Toutes les prétentions et les droits de propriété que la Compagnie a sur certains lots et parties de lots dans les rangs III et IV du Canton de Weedon comprenant environ 1 350 arpents en superficie; ainsi que le droit d’utiliser et d’exploiter la partie de la rivière, qui longe et traverse lesdits terrains…
4- Tous les droits que possède la Compagnie par bail emphytéotique de l’Hon. ministre des Terres et Forêts pour et au nom du gouvernement de la Province de Québec passé le 25 juillet 1915, devant Charles Delagrave, N.P., louant pour une période de 99 ans, toute cette partie du lit des forces hydrauliques de la rivière St-François, comprises depuis le prolongement de la ligne de séparation entre les lots 10-a et 11-1 du rang IV jusqu’à la ligne entre les lots 3-b et 3-c du rang III du Canton de Weedon couvrant une superficie d’environ 96 acres et mesurant trois milles en longueur.
5- Une exemption de taxes municipales pour une période de 15 ans datée du mois d’août 1912 de la part de la municipalité du Canton de Weedon sur les propriétés utilisées pour le développement de l’électricité dans ledit Canton, et l’autorisation de se servir des chemins de ladite municipalité pour y planter des poteaux, poser des fils, etc. En bas du barrage actuel, mais dans les limites des droits acquis par la Compagnie, il est possible, d’après les ingénieurs au courant du bassin de drainage qui alimente cette partie de la rivière St-François, de construire un autre barrage qui donnerait un minimum de 8 500 forces pour 365 jours par année, 24 heures par jour et ce, aussitôt que le gouvernement provincial aura terminé le barrage à la sortie du lac St-François et que les eaux de ce lac et du Lac Aymer seront contrôlées par la Commission des Eaux courantes de Québec. Ces travaux en phase terminale assureront à Weedon un débit régulier minimum de 1 100 pieds cubes par seconde. La distance entre le barrage actuel de la Compagnie à Weedon et la limite de la Cité de Sherbrooke est d’environ 27 milles en passant par les cantons de Weedon, Dudswell, Westbury et Ascot.
La Compagnie vendra son installation et tous les droits qu’elle possède telle qu’énumérée plus haut, pour la somme de 400 000 $.
Les directeurs de la Compagnie vous informent que la Compagnie Hydraulique de St-François sera prête à signer, avec la Cité, un contrat pour cinq ans de 1000 forces à raison de 25 $ par an.
Le 26 octobre suivant, il est écrit que la Ville va acheter le pouvoir de la Two Miles Falls. Après avoir reçu l’offre de la compagnie Two Miles Falls, le conseil, sous la direction du maire monsieur Sylvestre, s’est retiré et a siégé à huis clos. En substance, cette compagnie offre à la Cité 1 000 forces à raison de 20 $ par force par année de 365 jours 24 heures par jour livrées à Weedon. Elle s’engage à construire la ligne de Weedon à Sherbrooke en passant par Westbury pour laquelle la Ville s’engage à payer le coût et à en devenir propriétaire. Le contrat est bon pour trois ans et renouvelable pour trois autres années au même prix. La compagnie pourra fournir 1 000 forces additionnelles pour dix heures la nuit à 9 $ par force. Finalement, elle donne une option sur la propriété à Weedon pour un montant de 375 000 $. Le conseil a comparé ce prix et ces avantages avec ceux de la Shawinigan qui comprenaient 1 000 forces à raison de 30 $ la force pour dix ans. Il a été décidé à l’unanimité d’accepter l’offre de la Two Miles Falls puisque la Ville économisera de 6 000 $ à 7 000 $ par année tout en ayant la ligne Sherbrooke Westbury déjà construite.
Il est ajouté dans le journal que la ville a absolument besoin de pouvoir et qu’il faut qu’elle s’en procure immédiatement. Les travaux de construction de la ligne commenceront sans tarder pour que l’énergie électrique puisse se rendre à Sherbrooke dans six semaines.
Deux jours n’étaient pas passés qu’une réplique s’est fait entendre sur cet achat. On reprochait au conseil d’aller trop vite vers cet achat. Puis, dans les jours suivants, les journaux ont exposé un certain conflit au sujet de l’achat de la Two Miles Falls face à une offre de la Sherbrooke Railway & Power Co présentée par un monsieur McCuaig. Celui-ci avait acquis l’appui des trois échevins sherbrookois de langue anglaise, messieurs Parkes, Jenckes et Edwards. Les échevins Genest, Fortier, Charest, Brault sont, parmi les échevins, qui ont maintenu la décision de faire affaire avec la Two Miles Falls pour éviter que la ville soit jetée dans « les filets de monsieur McCuaig de la Sherbrooke Railway & Power Co.
Le 24 novembre, La Tribune annonçait que le cas de la Two Miles Falls était devant le juge Machinson en Cour Supérieure en rapport avec la demande d’identification d’échevins qui auraient agi de mauvaise foi dans cette affaire. Les avocats O’Bready et Panneton de la compagnie de Weedon demandaient à monsieur McManamy qui agissait pour messieurs Cate, Wells and White.
Monsieur Jean Cloutier de St-Jacques a acheté la maison de monsieur Edmond Morin qui était occupée par monsieur J. A. Leblanc. Il s’y installera le 20 août prochain et y ouvrira un salon de barbier dans le local.
À la mi-août, nous apprenons que la manufacture d’alcool de Weedon Station vient de changer de maître. Tout continue comme auparavant.
La période de la récolte des foins a été très propice. Une grande quantité de foin a été produite dans la région de Weedon.
Monsieur Étienne Magnan et Charles Gauthier ont transporté deux charges de grandes pièces de bois pour le compte de monsieur Edmond Morin qui a entrepris le déplacement d’une église protestante de Dudswell Corner à Bishops Crossing.
Monsieur J.E. Beaubien était le chef de gare à St-Gérard. Il s’est fait remplacer par monsieur Vallée pendant ses vacances.
Monsieur F. Lapointe était l’hôtelier à St-Gérard en 1916. Monsieur, de son côté, était opérateur à la station.
Mlle Rose Alba Biron est une modiste de Weedon. Elle a assisté à l’exposition de modes à Sherbrooke au début d’octobre. Mme Beaulac, une autre modiste de la même municipalité, est allée à l’ouverture des modes en ville.
Le Cercle agricole de Weedon est très actif dans la région. Il rend hommage aux cultivateurs qui se sont démarqués parmi les autres. Pour la production de l’orge, messieurs Joseph Barolet, Philippe Patry et Damien Després sont arrivés 1er, 2e et 3e. Pour la production des racines fourragères, messieurs Philippe Patry, Joseph Caron, Damien Després et Joseph Giguère se sont classés. Pour le trèfle, messieurs Jérôme Surprenant, Révérend J.A. Lefebvre, F. L. Baillargeon et Damien Després ont été primés.
En outre, grâce aux bons résultats dans la récolte de patates, le département de l’agriculture, sur la demande du juge du concours, a accepté d’accorder comme encouragement et comme récompense un octroi spécial qui sera divisé entre les huit premiers lauréats dont voici les noms : messieurs Joseph Caron, Jos Vallières, Achille Després, F. L. Baillargeon, William Galipeau, Rév. J. A. Lefebvre, Philippe Patry, Damien Després et Wilfrid Dumas. De plus, monsieur Léger Giguère a aussi obtenu une allocation spéciale pour son succès dans la culture du blé.
Monsieur Georges Lemay a vendu sa ferme à monsieur J. Lafond pour aller demeurer à Montréal avec sa famille. La ferme de monsieur Joseph a fait l’acquisition de monsieur Jos. Fisette. Puis, à son tour, monsieur Ferdinand Saulniers a vendu une des plus belles fermes de Wolfe située dans Lac Weedon (partie qui a été transférée au Canton de Weedon en 1935). Monsieur Éphrem Patry de Weedon en est le nouveau propriétaire. D’autres transactions ont eu lieu. Monsieur Alfred Girard a vendu sa ferme à monsieur Faucher puis a fait l’acquisition de celle de monsieur Henri Beauregard.
Un type de Disraeli a dû déguerpir rapidement après avoir été chassé par un citoyen de Lac Weedon. Il s’était installé avec sa voiture dans la rue en face de l’église pour faire du commerce c’est-à-dire la vente de pommes…
La vie communautaire
Un grand Euchre a eu lieu à la salle municipale de St-Gérard pour les profits de l’église et la paroisse, le 1er mars. Les personnes présentes ont eu droit à toute une organisation. En plus des nombreux prix donnés et gagnés par des participants, des chants organisés à l’improviste par Mlle R.D. Morin ont égayé les gens tout au long des activités.
Il faut se récréer un peu avant le carême. Le mardi gras, quelques-uns de nos jeunes gens se sont déguisés et promenés en mascarade et en chantant dans les rues de St-Gérard.
Le 15 avril, La Tribune demandait un correspondant pour couvrir le territoire de la municipalité de Lac Weedon.
Plusieurs de nos jeunes gens ont fait le pèlerinage à St-Anne de Beaupré.
Plusieurs gens de notre communauté ont participé à l’exposition de Sherbrooke. En autres, ce sont mesdames A. Lavergne, G. Biron, O. Lussier, messieurs L. Fontaine, J. Duchesneau, V. Lisée, H. Lussier, E. Biron, ainsi que messieurs et mesdames P. Lussier, E. Després, F. Lisée et M. Lavertu.
Vers la fin de septembre, c’est l’anniversaire de naissance de monsieur Pamphile Biron. À cette occasion, il reçoit de nombreux invités à la Villa des Cèdres. La belle température est de la partie. Tous se plaisent à souligner la fête de ce vénérable châtelain en participant au repas et aux joyeuses randonnées sur le lac.
Les loisirs et activités culturelles
Au début de juin, monsieur P. Biron et sa famille de Sherbrooke passent une quinzaine à leur chalet, la Villa des Cèdres située à la Pointe des Chênes.
Au cours des premières semaines du mois d’août, La Tribune écrit que nos chalets regorgent durant ces temps de chaleur que nous vivons.
À la mi-août, les membres du choeur de chant de la paroisse St-Jean-Baptiste de Sherbrooke nous ont rendu visite pour donner un délicieux régal aux amateurs de chant au cours de la messe dominicale. Par la suite, ils sont allés prendre un bon dîner et passer l’après-midi à Batoche au lac Aylmer au chalet de monsieur Pamphile Biron. Ce groupe a grandement apprécié la courtoisie de nos hôtes et l’organisation de cette excursion. Plus de deux cents personnes étaient présentes sur le bord du lac.
L’exposition tenue à Marbleton a été tenue avec succès. Un grand nombre d’étrangers se pressaient sur le terrain lors de cette journée. Les exhibits étaient nombreux et intéressants. C’est la fanfare d’East Angus qui s’exécutait lors du programme musical.
Mlle Marie-Anne Leblanc, candidate au concours de La Tribune, s’est mérité la deuxième place et a décroché un des magnifiques prix offerts.
1916, année de guerre
Un détachement du 171e de Québec fait une tournée à pied et à travers les Cantons de l’Est. Les brillants discours du lieutenant-colonel Sir William Price, du lieutenant-colonel O.E. Talbot et du lieutenant Léon Garneau ont été bien reçus à différents endroits où ils ont passé, entre autres à Weedon, St-Camille et Gould.
Monsieur Raoul Côté, un de nos militaires de St-Gérard installé à Valcartier, est venu en visite chez ses oncles Eusèbe et Edmond Côté. Il reviendra à nouveau dans son patelin à la fin du mois d’août. À la mi-juin, les journaux nous annonçaient que monsieur Omer Trottier du 22e bataillon avait été blessé.
Nous apprenons aussi que monsieur Joseph Brière s’est enrôlé dans le 117e qui est en formation à Sherbrooke.
Le 11 août 1916, nous apprenons que le jeune Maurice Tanguay, soldat du 2e régiment et fils de St-Gérard, est décédé au front. Des 18 jeunes gens qui sont partis de Weedon, c’est le premier qui se fait tuer à la guerre. Toutefois, deux d’entre eux ont reçu des blessures qui se sont avérées par graves. Ce sont Omer Côté et Adélard Magnan.
Monsieur Albert Tanguay, soldat à Valcartier, est venu rendre visite aux membres de sa famille. De son côté, le jeune P. Bourque, militaire au même endroit est venu chez les siens à Weedon.
Monsieur Philias Tanguay, père de Philémon, reçut une lettre de son fils sergent Tanguay de St-Gérard, actuellement sur la ligne de feu en France. Il lui raconte une charge du glorieux 22e régiment canadien-français. « Il n’y a rien de plus intéressant que de les enfiler», nous dit-il. En voici le contenu : « Mes bons parents, vous pouvez perdre toute inquiétude sur mon sort; je suis toujours debout et en parfaite santé. Réellement, on dirait que les Boches ne veulent pas de moi… Aussitôt arrivés, nous avons fait une des plus glorieuses charges à la baïonnette qui soient. Quand j’eus annoncé la nouvelle à mes hommes, ces vieux en sautaient de joie. Penses-y donc, attaquer les Boches? Ce n’est pas tout le monde qui a cette chance! À notre départ pour leur tanière, quelques-uns avaient le coeur un peu serré en pensant à leurs parents que plusieurs laisseraient en deuil, mais à quelque distance des lignes boches, on n’a pas le temps de penser parce que ces gueux commencent un feu de barrage terrible. Une bombe frappe une vingtaine de mes hommes ainsi que mon officier. Il me faut donc prendre charge de ce qui reste. Nous parvenons à traverser le feu sans qu’un autre fût frappé. À une petite distance plus loin, nous apercevons un village qui me semblait bien garni de Boches. Allons-y! Tout va bien jusqu’à ce que nous soyons à l’église. Là, une dizaine d’individus tentent de nous barrer le passage, mais par malheur pour eux, en un clin d’oeil on en eut disposé et permettez-moi de vous dire que ma baïonnette a contribué pour une bonne part à les effacer de ce bas monde. Après un combat de quelques minutes, le village nous appartient avec tout son contenu… quelques centaines de bonnes têtes… de Boches. Nous fortifions notre position et attendons du renfort, ayant reçu l’ordre de ne pas avancer plus loin. Lorsque j’eux compté mes hommes, je m’aperçus qu’il en restait… huit. Tous les gars de Weedon étaient debout ainsi que votre humble serviteur, naturellement. En terminant, je souhaite de tout coeur que ce récit, bien que très bref de notre petite attaque, ne vous donne pas de fausses idées ou opinions sur notre compte, car ma foi! Il n’y a rien de si intéressant au monde. Rappelez-moi au bon souvenir de tous mes anciens amis.» Philomon
Au début de novembre de cette année de guerre, les soldats Brière, Côté, Pépin et Tanguay installés à Québec passent quelques jours avec leur famille.
Une autre lettre du sergent Philomon, cantonné au front en France, est parvenue à ses parents vers le 7 novembre. Entre autres, on y lit : » j’ai bien failli être fait prisonnier. Heureusement, j’ai réussi à tuer mes deux boches avec la seule bombe, grenade à main, qui me restait ». « Pauvre garçon, écrit-on, que le ciel le protège toujours… »
De Québec, nous apprenons qu’un des nôtres, monsieur Jean-Baptiste Rousseau de Weedon a vécu une expérience pénible au large des côtes d’Irlande. Il s’était engagé sur le bateau vapeur Cabotia à Montréal avec quatre autres canadiens-français du nom de Gervais, Marquis, Beauséjour et Martel. Il était parti de Québec le 10 octobre sur ce vaisseau canadien qui transportait des chevaux pour le service d’outre-mer. Le 20 octobre, ils signalèrent deux sous-marins allemands au large des côtes d’Irlande. Le Cabotia fut torpillé. Les hommes n’eurent que le temps de sauter dans les bateaux de sauvetage. Des 70 membres de l’équipage, 30 purent s’échapper. Les autres périrent avec le bateau en mer. Ce brave homme de Weedon a erré pendant 15 heures sur un bateau à rames avec ses compagnons. Heureusement, ils furent rescapés par un navire de patrouille anglais. Les hommes ont passé 11 jours à Glasgow et sont arrivés à Québec à bord de l’Ionian de la ligne Allen.
Monsieur Lucien Leroux d’Ham Sud faisait partie du 178e régiment de Sherbrooke. À la mi-novembre, il a rendu visite à sa famille.
Décès, maladies et accidents
Un malheureux accident est arrivé chez monsieur Caron, marchand à Gould. Son fils a reçu une balle de fusil tirée par un camarade de son âge qui pratiquait le tir sur une cible. La victime voulait s’approcher de celle-ci alors que son ami s’apprêtait à tirer. Une médecin lui pratiqua sous ses soins, mais malheureusement, l’enfant a expiré quelques heures plus tard.
En début de février, monsieur François-Xavier Fortier a été électrocuté aux usines de la Compagnie hydraulique St-Francçois. Il était âgé de 50 ans. En transportant une barre de fer pour faire des réparations dans ces lieux, celle-ci toucha des fils. La décharge électrique l’a tué instantanément.
Dans La Tribune du 13 mars 1916, une liste des morts et blessés publiée par le ministère de la Milice d’Ottawa annonce que l’un des nôtres a été blessé sur le champ de bataille. Le soldat Omer Côté de Weedon fait partie de cette liste. Il était membre du 22e régiment canadien-français. Heureusement, il est ajouté que ses blessures étaient légères.
Mlle Georgianna Brière, fille de Siméon, est décédée en mars à la suite de plusieurs années où sa santé s’était avérée chancelante.
Madame Adélaïde Trahan, épouse d’Octave Gaudreau est décédée à Weedon le 19 mars. Elle faisait partie de la famille Trahan qui, dans les années 1880, est venue bâtir ce qui a été appelé le Village Trahan.
Monsieur Euclide Giguère a fait la location de la belle ferme de monsieur Justinien Benoît. Ce dernier demeurera chez sa fille, madame Bernard Tanguay.
Un curieux décès est survenu à un ancien résident de Ham Sud. Monsieur Wilfrid Guay est mort à la suite d’un empoisonnement survenu sur les lieux de son travail à Lowell, Massachusetts. Il avait l’habitude de mâcher des herbes qui lui tombaient sous la main en travaillant. C’est en creusant des fossés dans la corporation de Lowell qu’il prit des racines de sumac vénéneux pour satisfaire sa mauvaise habitude. Quelques minutes à peine ont suffi pour qu’il se sente mal. Décidé d’aller chercher de l’aide, il est parti à bicyclette. Ses compagnons l’ont vu chanceler puis tomber à peu de distance d’eux. Il fut transporté à l’hôpital où il est décédé à peine une heure et demie plus tard.
Au mois d’avril, monsieur Zoël Croteau de St-Gérard a subi une attaque de paralysie qui lui a fait craindre le pire. Heureusement, sa santé s’est rétablie assez rapidement.
Au cours de la dernière semaine de mai, une certaine épidémie règne dans nos parages. Plusieurs concitoyens en sont atteints. 16 cas se sont déclarés à Stratford, 21 à St-Gérard et plusieurs à Garthby et Weedon. Les médecins déclarent que cette maladie étrange n’est pas contagieuse.
Madame O. Sévigny, née Rébecca Rousseau et fille d’Isaïe de Wolfestown, a été déclarée gravement malade à St-Gérard au début de juin. Son état était critique. C’est au début du mois suivant qu’elle est décédée.
Plusieurs décès de jeunes enfants ont eu lieu, le couple Montour a perdu leur dernier enfant à l’âge de six mois. Puis, monsieur et madame Georges Fontaine ont perdu des jumeaux, l’un à trois jours et l’autre à deux mois et demi. À la fin du mois de juin, le bébé de monsieur et madame Georges Tremblay a rendu l’âme. Il n’avait vécu que 15 jours.
Un ancien concitoyen et forgeron de St-Gérard, monsieur Elzéar Morin, est décédé après s’être approché de Sherbrooke pour recevoir des soins dont il avait besoin.
Un convoi du Québec central qui circulait entre Weedon et Marbleton a frappé un homme qui marchait le long de la voie ferrée. Heureusement, il ne fut que légèrement blessé au côté.
Monsieur Ernest Desmarais a été victime d’un sérieux accident de Weedon à la fin de juillet. Son état de santé s’améliore considérablement.
Un télégramme d’Ottawa, reçu au début d’août, nous annonce que monsieur Maurice Tanguay, fils d’Adolphe Tanguay de Weedon, a été tué au front au mois de juillet passé. Ce jeune volontaire était le neveu du député Napoléon Tanguay et du procureur du séminaire Mgr Tanguay. Il était un ancien élève du séminaire St-Charles de Sherbrooke. Sa mort au combat a causé une grande peine chez les siens et ses anciens compagnons d’études.
Madame Damase Galipeau, née Sophie Magnan, est dangereusement malade depuis quelques jours. C’est quelques journées plus tard que Damase lui-même a vécu ses derniers jours. Les funérailles de cet ancien de Weedon ont eu lieu ce vendredi suivant dans la dernière semaine de septembre. Il venait de déménager sa maison du Vieux Village à Weedon Station.
Un éboulis a fait deux victimes. Heureusement, messieurs F. Scott et M. Ducharme de Fontainebleau n’ont eu que des blessures à soigner lors d’un éboulis qui a eu lieu en chargeant une voiture dans un puits de graviers local. Ensevelis sous cet éboulis, on leur porta rapidement secours en réussissant à les déterrer. Monsieur Ducharme s’en est tiré avec quelques contusions à la jambe tandis que son compagnon dut garder le lit pendant plusieurs jours pour soigner des blessures plus graves.
À la fin de septembre, un accident a eu lieu sur le chemin menant de Marbleton à Weedon. Messieurs Lafond et Fortin revenaient de Sherbrooke alors que les phares de l’auto s’éteignirent soudainement. Malgré l’obscurité, monsieur Lafond a poursuivi la route. Quelques instants plus tard, le véhicule s’est retrouvé sur le capot dans le fossé. À la suite de leurs appels à l’aide, des bras solides ont soulevé l’auto. Messieurs Lafond et Fortin ne souffraient que de contusions peu sérieuses tandis que le jeune Émery avait une fracture à une jambe. Il a reçu les soins de monsieur le Dr Lemieux.
Une explosion est survenue à la Weedon Chemical Co. Monsieur Ovila Marcoux, plombier de métier, fut victime d’un accident qui aurait pu lui être néfaste. Il réparait un tuyau d’écoulement d’un réservoir d’alcool lorsqu’il sortit une allumette de sa poche et l’enflamma en même temps qu’un cri l’avertissait du danger. Gravement blessé à la figure et aux mains par l’explosion, il fut projeté à une quinzaine de pieds au loin. Sa chute lui occasionna d’autres blessures légères aux jambes. Il avait oublié le danger de la chaleur auprès de ces tuyaux pleins d’alcool. Heureusement, aucun autre travailleur n’a été blessé.
Monsieur Achille Lemay, fils de Mme Veuve Norbert Lemay, est décédé à l’âge de seize ans. Il laisse sa mère, une soeur Lucienne et deux frères Omer et Arthur Lemay.
Le Dr Lambert était le médecin pratiquant dans la municipalité voisine de Marbleton alors qu’à Weedon, Monsieur J.-P. Cyrénus Lemieux professait dans le même domaine.
Nous apprenons qu’à la fin d’octobre madame H. Fontaine de Weedon revient promptement à la santé après une attaque d’apoplexie.
Monsieur F.-X. Galipeau, un vieux citoyen de Weedon et de Lac Weedon a été déclaré gravement malade à St-Gérard à la fin d’octobre. Cet homme de 81 ans est décédé au début de novembre. Avec son père François-Xavier, sa mère et ses frères et soeurs, il est venu dans le Canton dès les années 1850 pour y défricher les premières terres de notre patelin. Il fait partie des premières familles fondatrices de Weedon.
En novembre, madame Armand Marchand, née Rosa Giguère, est décédée à Weedon à l’âge de 22 ans. Elle laisse son époux et un enfant de dix mois seulement. À quelques heures d’intervalle, un autre jeune, Renaud Lebel fils de Louis, est décédé à l’âge de 11 mois.
Monsieur J. Bourgault, tailleur, a dû subir une opération pour l’appendicite à l’hôpital de Sherbrooke.
Monsieur Albert Gagnon de St-Gérard a failli se faire tuer dans une mine dans les environs de Coleraine.
À la mi-décembre, un autre pionnier est décédé en la personne de monsieur Jean-Baptiste Caron à l’âge de 84 ans. Ce défricheur avait quitté la région maskoutaine à 16 ans en 1848 pour venir défricher un lot dans le Canton de Weedon.
La famille de madame Michel Bouchard, née Gingras, est décédé à Weedon au lendemain de Noël.
Autres
Dans notre tranquille petite municipalité, un conflit a causé une malheureuse bataille entre un chrétien résident d’un certain village voisin et un juif marchand ambulant. Cette scène tragique s’est déroulée en pleine rue de St-Gérard. Les spectateurs en ont eu pour leur argent alors que la police était complètement absente. Il semblerait que ce n’était pas la première fois qu’un tel conflit avait lieu entre ces deux individus.
D’autres jeunes de St-Gérard ont décidé de répondre à l’appel aux armes et d’aller aux services de la patrie. Ce sont messieurs Étienne Magnan, fils de Isaac Magnan et Albert Tanguay, fils de Philias et frère du caporal Philémon Tanguay du célèbre 22e régiment déjà en service sur le front français. Dans La Tribune, il est écrit : « Ne vaut-il pas mieux de faire tout ce qu’il est possible pour vaincre les « Boches » que de courir le risque de devenir une colonie allemande. » Il est ajouté : « Que tous les papas qui mettent un bâton dans les roues y pensent sérieusement! »
Quelques jeunes militaires sont venus visiter leurs familles avant de partir outre-mer. Ce sont Albert Tanguay, Raoul Côté de St-Gérard et un certain monsieur Drapeau de Weedon.
Le 17 avril, La Tribune écrit que plusieurs jeunes venant de Weedon se sont enrôlés dans les bataillons recrutés à Disraeli et à Thetford Mines.
La maison de monsieur Frédéric Saulniers située dans le 7e rang a été complètement détruite par un incendie à la mi-avril. Au moment où il assistait à la vente par encan chez monsieur Charles Gauthier et que son épouse était seule à la maison, un incendie s’est déclaré chez lui. En quelques instants, sa demeure était transformée en un immense brasier. C’était l’ancienne propriété de monsieur P. Phaneuf. Aucun bien n’a pu être sauvé. La cause était inconnue au moment de la parution de cette nouvelle.
Un vol de sirop d’érable a eu lieu à la cabane à sucre de monsieur Paul Galipeau à St-Gérard. Les voleurs ont fait main basse sur neuf ou dix gallons de sirop qui devait être utilisés lors d’un rendez-vous d’amis dans ces mêmes lieux pour le dimanche suivant.
Monsieur Wilfrid Paré du Canton de Weedon a porté plainte contre monsieur McDonnell de Springhill pour voies de fait causant des blessures nécessitant les soins du médecin. Le défendeur a d’abord plaidé non coupable recevant une demande de cautionnement de 100 $. À sa sortie du palais de justice, il y retourna pour avouer sa culpabilité. Le magistrat Mulvena lui imposa une amende de 5,00 $ plus les frais et trente jours de prison. Accusé aussi de menaces envers le plaignant, il a dû fournir un cautionnement de 100 $ pour garder la paix à l’avenir.
Au début d’août, la foudre a occasionné un incendie à la grange de monsieur Joseph Barolet. Le feu l’a consumée entièrement ainsi que la récolte de foin, les instruments aratoires et les animaux qui s’y trouvaient. Les pertes s’élèvent à 3 500 $. Aucune assurance ne couvrait ces dommages.
Cette même foudre a mis le feu à un transformateur électrique à St-Gérard. Monsieur Arthur Lussier a tenté d’éteindre les flammes qui consumaient l’huile du transformateur. Il fut soudain cloué à son échelle par la force de l’électricité qui s’y échappait. Heureusement, il n’a pas vécu de conséquences à la suite de son audace. Des mesures ont été prises immédiatement après que d’autres flammes soient apparues. La St-Francis Power Co a donc transporté en d’autres lieux cet appareil défectueux.
À la fin d’août, plusieurs citoyens de Weedon se plaignent que les jolis bouquets et les jardinières, qu’ils installent sur leur balcon, disparaissent à la faveur de l’ombre de la nuit. Des maraudeurs prennent plaisir à se monter une belle collection de ces décorations.
Monsieur Donat Lussier et Mlle Roy de St-Julien ont failli se noyer. C’est en revenant des noces de monsieur Jean Turcotte qu’ils eurent à traverser en bac la rivière Saumon. Une autre voiture précédait celle de monsieur Lussier. Pris d’une fantaisie subite, le cheval de ce dernier se mit à reculer. Voiture et occupants tombèrent dans la rivière. Heureusement, ils ont pu s’en tirer sans aucune conséquence fâcheuse.
C’est dans La Tribune du 11 septembre 1916 que les gens ont appris que le pont de Québec s’était écroulé pour une deuxième fois. La chute de 1907 avait causé le décès de 70 ouvriers. La travée centrale qui avait exactement 640 pieds de longueur, 88 pieds de largeur et 110 pieds de hauteur pesait 5 100 tonnes. Elle avait été construite à Sillery à environ trois milles en aval du pont. On se servait de six bateaux plats de 165 pieds de long, 32 pieds de large et 11 pieds et 6 pouces de hauteur.
Ce pont fut construit au-dessus du St-Laurent au coût de 17 000 000 $ pour éviter 200 milles entre Halifax et Winnipeg. La plupart des ouvriers étaient des Indiens de Caughnawaga.
Ce jour-là, les travaux se sont poursuivis d’une façon normale pendant plus de deux heures lorsque, soudainement, la travée chancela. Un cri horrible se fit entendre et l’immense tablier de fer s’écroula dans le fleuve avec tous ses occupants. Au moment de cet accident, il était difficile de connaître le nombre de victimes de cet accident.
C’était le 10 octobre. Monsieur et madame Paul Fontaine s’étaient absentés de la maison. Un incendie s’est déclaré à la grange. Quelques heures plus tard, elle était complètement détruite. Il est possible que des allumettes apportées à la grange par un enfant soient la cause de ce feu. Les pertes sont considérables; plus de 40 tonnes de foin et plusieurs autres produits agricoles ont été détruits.
À St-Gérard, le feu a détruit la boutique de forge et l’écurie de monsieur Eugène Rosa du village de Stratford avec l’outillage de forge, l’engin à gazoline, deux chevaux, une vache, une voiture et les harnais, etc. Les pertes se chiffrent à 3 500 $.
Un autre édifice de cette municipalité a été détruit par un violent incendie. En effet, l’hôtel Lapointe, anciennement l’hôtel Beaupré, a été réduit en cendres, à la fin de décembre, pendant la nuit sous une température de 15 degrés sous zéro. Les pensionnaires ont juste eu le temps de s’échapper. Malgré les efforts des pompiers volontaires, l’édifice et tout son contenu ont été détruits. Les pertes sont totales et s’élèvent à plus de 7 000 $. Une cheminée défectueuse fut à l’origine de l’incendie. Madame Hormidas Lussier alla prévenir tous les gens du village qui n’ont pas de téléphone, les invitant à aller porter secours aux sinistrés. La maison voisine qu’occupait monsieur Eugène Côté a aussi été réduite en centres. Heureusement, tout le ménage a été sauvé.