Années 1852 à 1860

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Années 1852 à 1860 2018-03-31T13:53:24-04:00

Les Débuts du Canton de Weedon (suite)

L’exode des familles vers la Nouvelle Angleterre

Depuis quelques années, certaines régions du Québec, dont celle de St-Hyacinthe, vivent un exode vers les États-Unis puisqu’on ne peut installer les fils sur des terres de plus en plus rares. Les usines de textile et de chaussures de la Nouvelle-Angleterre attirent des familles entières. Cette migration inquiète le clergé. Les évêques et curés invitent leurs paroissiens à devenir colonisateurs des Cantons de l’Est. À St-Hyacinthe région durement touchée par cet exode, une société de colonisation est fondée et s’acharne à prêcher la fondation des nouvelles familles dans l’est.

En 1851, douze missionnaires s’entendent pour remettre un manifeste intitulé « Le Canadien émigrant » aux gouvernants à Kingston, la nouvelle Capitale du Canada. Par ce moyen, ils font un plaidoyer pour faire connaître la richesse des Cantons de l’Est. Ils y énoncent des mesures pour développer sa colonisation : construction de routes, de chemins de fer et instauration de municipalités locales. Au cours de quatre années suivantes, cette dernière mesure permettra au gouvernement d’ériger de nombreuses municipalités dans les cantons, dont Weedon et plusieurs des environs.

La vie paroissiale

Lors des visites des missionnaires, les familles se rassemblent dans des maisons privées. Un lieu de rassemblement devient de plus en plus nécessaire. En octobre 1851, l’abbé F.-X. Bégin devient curé de Garthby et missionnaire de Weedon et de Stratford. Ce cinquième missionnaire constate rapidement ce grand besoin. C’est à l’unanimité qu’il reçoit l’idée de la construction de la première chapelle dans notre canton, mais deux clans de paroissiens s’opposent au sujet des lieux à privilégier. Les uns veulent bâtir au centre de la population alors que d’autres, moins nombreux, désirent construire près de la rivière Weedon et du moulin à scie où il existe un pouvoir d’eau. Ce dernier terrain appartient à des Anglais qui ne cachent pas leur intention de diviser leurs terrains en plusieurs emplacements autour de la chapelle projetée, pour en faire un village où les gens s’établiront. Chaque groupe de paroissiens a fait valoir leurs raisons au cours d’une longue démarche auprès de l’évêché de Québec et les deux options offrent gratuitement les terrains requis.

Arrivent d’autres événements qui retardent cette importante décision. Jusque-là, la paroisse appartient à l’Archevêché de Québec. Un premier changement survient. Dès le début de 1852, notre paroisse relève du nouveau diocèse de Trois-Rivières qui, dorénavant, sera sous l’autorité de Mgr Thomas Cooke le nouvel évêque du nouveau diocèse. De plus au même moment, l’abbé Georges-Jacques Duhault est nommé curé de Wotton et chargé de la desserte de Weedon. Ce sixième et nouveau missionnaire réussit à passer l’idée de la majorité des paroissiens qui est aussi la sienne. Il fait fixer une croix sur l’emplacement de la future chapelle sur une partie du lot 14 du rang VI. Il détermine à proximité le nouveau cimetière où une première personne est inhumée en octobre 1852. Ce sera Rosalie Lussier, 19 ans, fille de Joseph.

L’abbé Duhault prévoit une augmentation de la population de paroissiens. Il prépare les plans et devis d’une construction dont les dimensions seront 50 pieds de longueur, 40 de largeur et 16 pieds de hauteur. La charpente et le toit seront soutenus par huit colonnes qui permettront d’ajouter un jubé et des galeries. La chapelle sera recouverte d’un lambris de planches superposées. Le contrat qui devra se terminer à l’automne 1853 est donné à Pierre Fournier, paroissien du canton et ce, au coût de 300 $. Le 2 juillet 1854 après un retard pour causes imprévues, l’entrepreneur livre la construction à la paroisse et l’abbé Duhault célèbre une première grand-messe chantée à Weedon.

Pour recevoir le missionnaire qui vient faire sa visite paroissiale régulièrement, un modeste presbytère de 30 pieds par 36 est construit durant l’hiver 1855 grâce à des travaux exécutés par corvée et dirigés par le syndic. Cette modalité permet aux moins nantis d’y participer sans avoir à débourser de montants d’argent et à limiter le coût total de l’édifice à 200 $.

Depuis l’automne 1852, Mgr Cooke de Trois-Rivières a visité à deux reprises toutes ses paroisses à l’exception de celles situées sur les rives de la St-François. La qualité des routes en est la cause. Il réalise donc sa première visite à Weedon à l’hiver 1857. Il est accompagné par le missionnaire de notre paroisse et curé de Wotton l’abbé Duhault, par le curé Trahan de Richmond et l’abbé J.-O. Prince de Drummondville. La chapelle n’est pas terminée; elle est aussi froide qu’un hangar malgré un feu qui rougit poêle et tuyau. Tout le monde grelotte. Tous les prêtres portent casques et mitaines et se couvrent de pelleteries pour entendre les confessions.

Notre évêque n’oubliera pas de sitôt ses engelures aux pieds et aux mains qu’il a subis lors de ce périple. Lorsqu’il choisira le saint patron de notre paroisse, il choisira sans hésiter Saint Janvier, un nom qui rappellera les rigueurs de l’hiver. L’été suivant, les paroissiens de Weedon qui sont froissés par ce choix d’un patron inconnu, tentent sans succès de le faire modifier. Les vocables de Saint Louis et Sainte Rosalie qui étaient préférés des paroissiens n’attirent d’aucune façon son Excellence. Il maintient la nomination de Saint Janvier comme patron de notre paroisse.

Finalement en 1857, la population de la paroisse a crû très rapidement et s’élève à 595 âmes, dont 295 enfants.

Le septième et dernier missionnaire à être désigné par Mgr Cooke sera l’abbé Alexandre Bouchard curé de Stratford. Il sera responsable de la desserte de Weedon et Garthby de 1857 à 1862.

Les affaires municipales

Jusqu’en 1851, le canton de Weedon faisait partie du Comté de Sherbrooke. Au cours de cette année, les colons ont élu deux représentants sur le conseil. Suite à un rapport d’un comité d’élection, François-Xavier Gauthier et Pierre Fournier ont été choisis pour y siéger. Ils furent les premiers conseillers canadiens-français du comté de Sherbrooke. À cette même réunion, François-Xavier Brière fut nommé grand voyer et Joseph Biron et Charles Gauthier, inspecteurs des chemins et des ponts du canton de Weedon. En 1852, Germain Biron remplace Pierre Fournier comme conseiller dans le comté de Sherbrooke; puis en 1853, Charles Landry succède à François-Xavier Gauthier; finalement, Georges prendra la place de Germain, son père, en 1854.

La population de ce nouveau territoire augmente très rapidement. C’est le 1er juillet 1855 que le Gouverneur Lord Elgin proclame sous le grand sceau des provinces unies du Haut et du Bas-Canada l’érection de la municipalité du Canton de Weedon. Elle adoptera les limites du canton de Weedon tel que divisé précédemment. Les premiers conseillers seront François-Xavier Brunelle, Jean-Baptiste Delude, Georges Biron et Pierre Després alors que Joseph-Eusèbe Côté deviendra le premier maire de cette nouvelle municipalité le 12 novembre 1855. Le premier secrétaire-trésorier sera Casimir Fontaine. Joseph-Eusèbe Côté le remplacera en 1858 et Siméon Fontaine en 1860. Dans la même année, l’on verra plusieurs autres municipalités être créées dans les Cantons de l’Est dont une voisine, la Municipalité de Lingwick le 1er août 1855 qui avait déjà reçu un groupe d’Écossais autour des années 1835.

Pierre Harpin sera le remplaçant du maire Côté le 21 juillet 1858. Puis à son tour, François-Xavier Brière lui succèdera le 16 janvier 1860.

La première école du canton

Depuis l’arrivée de Germain Biron avec sa famille en 1841 et l’arrivée massive des nouvelles jeunes familles à partir de 1847, les enfants de la paroisse ne reçoivent aucun enseignement. C’est en 1855 que François-Xavier Gauthier adresse une demande au gouvernement pour avoir l’autorisation d’ouvrir une école dans le canton de Weedon en septembre suivant.

Les citoyens et l’abbé Duhault se mettent d’accord pour utiliser une partie du presbytère nouvellement construit et non habité par le missionnaire qui ne vient dans la paroisse qu’à certaines occasions dans l’année. La demande acheminée à l’évêché en mars 1856 n’obtient de réponse qu’en juin, accompagnée de souhaits de franc succès pour cette initiative prise par les responsables. La municipalité prend charge de préparer un petit local d’une quinzaine de pieds en faisant une « cloison faite de planches brutes ». Il servira de maison d’école au cours de la semaine et de salle de conseil et de lieu de rencontre pour les habitants le dimanche et les jours de fête.

Dès le 1er septembre 1856, c’est le bonheur. Sophie Gauthier reçoit une quinzaine d’enfants dans le presbytère. L’année suivante, Philomène Côté prend la relève puisque les progrès des enfants sont évidents. En septembre 1858, Éliza Benoît enseigne à son tour dans le même local offert par la paroisse depuis quelques années. Les démarches ont porté fruit et le nombre d’enfants augmente chaque année.

Au cours de l’année 1858, les contribuables construisent une première maison d’école. Elle sera située près du moulin Fournier et de la rivière Weedon, endroit qu’on appellera longtemps « le Vieux Village ».